Vous vous souvenez sans doute de cette phrase qu’on disait en jouant à la cachette, après avoir compté jusqu’à 100, en sautant quelques dizaines… Je la transforme un peu, en ce jour grandiose et lumineux de Pentecôte, pour dire à pleine voix : comme chrétiens, chrétiennes, ne nous cachons pas! Ne jouons pas à cache-cache avec notre monde contemporain, mais soyons fiers de notre foi en Christ et de notre appartenance à son Église. Nous sommes tous ‘prêtres, prophètes et rois’ de par notre baptême, et le monde a besoin de nous tous.

Depuis la Pentecôte, nous sommes entrés dans l’ère du témoignage, le temps de l’Église, et le Seigneur compte sur nous, quels que soient notre âge, notre état de santé, notre vocation, nos charismes, notre état de vie, etc. Nous sommes ses envoyés. Et nous devons conjuguer discernement et audace, réflexion et confiance, formation et implication dans la mission qui nous est confiée.

J’ai connu des séminaristes qui n’en finissaient plus de se questionner et qui, finalement, ont laissé tomber leur cheminement vers la prêtrise. « Est-ce vraiment ça, que le Seigneur veut? Est-ce vraiment ma vocation? Serai-je heureux? Serai-je capable de vivre le célibat? » Questions fondamentales, importantes, certes. Mais vient un temps, après une bonne formation, et après que le discernement ait été fait avec sérieux, bien accompagné, où il faut sauter à l’eau, se mouiller, franchir le pas, se donner sans regarder en arrière. Une grande part d’incertitude demeure, c’est certain. Faut vivre avec. Comme dans le mariage ou toute autre vocation. Si on attend d’avoir la conviction d’être totalement prêt à faire quelque chose, d’avoir toutes les assurances du succès, on risque de faire du sur place. On apprend à skier en montant sur nos deux planches, sur une pente, et en se lançant du sommet, en tombant de temps en temps… Mon curé de stage m’avait dit, avec humour : ‘le jour de notre ordination, nous recevons la grâce d’aveuglement. Heureusement que nous ne voyons pas tout ce qui nous attend, sinon nous changerions d’idée!’ Vrai pour toutes vies et tout engagement. À force de vouloir tout rationnaliser, calculer, prévoir, on finit par rester figés par la peur de se tromper… Surtout si on se sent très impacté par le regard des autres, ce qu’ils peuvent penser de nos choix, de nos convictions. La maturité psychique et spirituelle nous amène résolument au-delà de cela.

L’Esprit souffle sur notre voile, chers consacré-e-s par le baptême. Rappelez-vous le chant de Confirmation : ‘Partir à l’aventure’. Voilà la vie chrétienne. Le Souffle Saint nous pousse hors de nos zones de confort, hors de nos vieilles habitudes et de nos sentiers battus. Larguons les amarres. En psychologie on parle beaucoup de l’importance du ‘lâcher-prise’; cela pourrait-il s’appliquer à la spiritualité chrétienne? Sans doute. On appelle cela l’abandon évangélique. Ce n’est pas de la dé-mission, au contraire. Mais à trop vouloir tout contrôler, on freine, et même on tue la vie… Je dis toujours : quand un corps ne bouge plus, c’est qu’il est mort. On sait ce qui arrive à une eau stagnante… Aujourd’hui, en cette grande fête de l’engagement, faisons le vœu de ressusciter, de re-susciter du mouvement vers l’avant. Ne crucifions pas la Vie divine que nous portons entre les deux voleurs que sont la nostalgie d’hier et la peur de demain. Bon voyage!